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Quête de Spiritualité personnelle vers l'Ascension...

Ce Qui Menace la Planète...

 
CE QUI MENACE LA PLANÈTE
par
IGNACIO RAMONET

Extraits de L'ATLAS ENVIRONNEMENT : Analyses et solutions, pages 6 À 10.
Le Monde diplomatique, 2007.

Référé par :   http://www.eveildelaconscience.ca

 

L'effroi et les profits

 

Pourquoi la question écologique, si longtemps niée ou minimisée, est-elle à nouveau au centre des préoccupations des dirigeants politiques, des médias et des citoyens ? Pourquoi des problèmes qui paraissaient sans solution trouvent-ils soudain réponse?

Il y eut sans doute, au départ, l'inlassable travail d'alerte conduit par des organisations écologistes, sur la base de rapports scientifiques - en particulier ces penseurs, fondateurs de l'écologie moderne, regroupés sous le nom de Club de Rome, qui publièrent en 1970 un retentissant rapport inaugural qui allait réveiller les consciences planétaires1.

En France, dès 1974, René Dumont, premier candidat écologiste à l'élection présidentielle, fit prendre conscience à toute une génération des limites des ressources naturelles et des risques d'une croissance économique exponentielle. Vint ensuite le décisif rapport Brundtland, publié en 1988 sous le titre Notre avenir à tous2 par la Commission mondiale sur l'environnement et le développement présidée par Mme Gro Harlem Brundtland. Ce rapport introduisait le concept de "développement durable", devenu si familier depuis. La prise de conscience collective s'est accélérée ensuite, avec le sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992. A cette occasion, on a appris que la population mondiale croît à un rythme sans précédent: nous sommes 6,5 milliards, et ce chiffre ne se stabilisera que vers 2050 - autour de 10 milliards.

Or, comme divers articles de cet Atlas environnement le démontrent, si tous les humains avaient le niveau de consommation des Terriens les plus riches, la planète pourrait à peine subvenir aux besoins de quelque 600 millions de personnes. Car les ressources ne sont pas inépuisables. Au nom d'une confusion entre croissance et développement, la destruction systématique des milieux naturels se poursuit, au Nord comme au Sud. Les saccages en tous genres se succèdent, infligés aux sols, aux eaux et à l'atmosphère. Gaspillage énergétique, urbanisation galopante, déforestation tropicale, contamination des nappes phréatiques, des mers et des fleuves, appauvrissement de la couche d'ozone, pluies acides ... Tout cela, cartographié avec précision dans cet Atlas, met en péril l'avenir de l'humanité.

Ces informations ne semblent avoir produit un salutaire choc collectif que récemment. Grâce en particulier au film d'Al Gore, Une vérité qui dérange, l’ancien vice-président des Etats-Unis nous a rappelé que l'accumulation des gaz à effet de serre pourrait entraîner un réchauffement de 1 à 2 °C de la température moyenne de la planète et une élévation de 0,2 à 1,5 mètre du niveau des océans. Le dioxyde de carbone (C02), principal gaz à effet de serre, est responsable à 65 % du réchauffement climatique. Or, avec l'apport de géants comme la Chine ou l'Inde, le CO2 augmente chaque année d'environ 8 milliards de tonnes.

L’ampleur et la durée futures de la hausse des températures seront fonction des quantités de gaz à effet de serre que nous continuerons à émettre, les perturbations climatiques étant d'autant plus prononcées que la température s'élève. Et cela s'accompagne d'une fréquence et d'une violence accrues des phénomènes météorologiques extrêmes (tempêtes, déluges, cyclones, canicules, sécheresses, désertifications), ainsi que d'un progressif dérèglement climatique étendu à toute la planète. Si les émissions de gaz à effet de serre ne prennent pas fin, les désastres pourraient être d'une exceptionnelle gravité.

La conférence de Berlin sur le climat, en avril 1995, a souligné l'idée que le marché n'est pas en mesure de répondre aux risques globaux pesant sur l'environnement. Protéger la biodiversité, la variété de la vie par le développement durable est désormais un impératif. Les pays riches - et notamment les EtatsUnis, responsables de la moitié des émissions de gaz carbonique des pays industriels - sont tenus de respecter les engagements souscrits au sommet de la Terre de Rio, en 1992.

Si l'Union européenne s'est prononcée pour une réduction des gaz à effet de serre à l'horizon de l'an 2010, l'administration américaine continue de traîner les pieds et refuse toujours de ratifier le protocole de Kyoto - entré en vigueur en février 2005 -, qui contraint les 38 pays industrialisés à réduire de 5,2 % les émissions de CO2 d'ici à 2012 par rapport à celles de 1990.

Mais le retournement de l'opinion publique, effrayée par la multiplication des catastrophes naturelles, pousse les gouvernements, même les plus réticents, à miser sur des solutions énergétiques de rechange. D'autant que la fin des hydrocarbures apparaît désormais inéluctable et que les Etats riches, pour des raisons politiques et non écologiques, voudraient réduire leur dépendance énergétique à l'égard de grands pays pétroliers comme la Russie, l'Iran, l'Irak ou le Venezuela.

Le contexte est donc propice à un changement de modèle énergétique que les industriels du Nord semblent avoir perçu, et qui, avec la perspective de formidables profits, promet d'enclencher un nouveau cycle économique, celui de l'économie verte3.

L'environnement en sortira-t-il gagnant? Ce n'est pas sûr, car déjà on annonce la construction de centaines de nouvelles centrales nucléaires, certes peu productrices de CO2, mais porteuses d'autres dangers non moins mortels.

Le pari aussi des agrocarburants, bien accueillis dans un premier temps, commence à révéler des effets pervers. D'abord, ils vont permettre, en toute bonne conscience, de maintenir, voire d'intensifier, le néfaste modèle du "tout voiture" ou du "tout camion" au prétexte que les véhicules pollueront moins. Ensuite, ils enclenchent une spéculation effrénée sur des produits alimentaires de base comme le sucre ou le maïs, qui servent à produire de l'éthanol. Les prix du blé et de l'orge ont déjà augmenté de 70 à 80 % en moins d'un an, et ceux du maïs ont doublé. La hausse de la demande mondiale d'agrocarburants nécessitera d'augmenter de 20 à 30% les surfaces cultivées. Ce qui ne se peut pas, sauf à provoquer des déforestations effrayantes en Amazonie ou dans le bassin du Congo...4

Comme le démontre cet Atlas, changer de modèle énergétique sans modifier le modèle économique risque de seulement déplacer les problèmes écologiques. Mais désormais l'opinion publique veille. Et finira par imposer de vraies solutions vertes.

Ignacio Ramonet

  1. Halte à la croissance? Rapports sur les limites de la croissance, Fayard, Paris, 1972.
  2. Editions du Fleuve, Montréal, Québec, 1988.
  3. Lire le dossier spécial "Business of green", International Herald Tribune, Paris, 4 juin 2007.
  4. Cf Le Monde, 7 juillet 2007.

     

 

Quelle grille de lecture?

L'opinion prend rapidement conscience de la gravité du défi environnemental lancé à l'humanité. Au-delà des "questions écologiques", c'est un nouveau paradigme qui s'impose, hors duquel le siècle commençant serait illisible. Même si certains essaient de récupérer à leur profit le tournant en cours ...

Le succès international d'Une vérité qui dérange, le film d'Al Gore, reflète - et, en retour, accentue - la perception croissante qu'ont les citoyens des désordres environnementaux, de leurs causes et, pour une part, de leurs solutions.

Mais ceux qui se targuent de penser le monde prennent-ils pleinement la mesure de l'indispensable révolution? Et d'abord intellectuellement: le grand apport des écologistes conséquents, c'est d'avoir fait découvrir à un large public que la survie de la planète constituait désormais la priorité des priorités, en amont de toute autre problématique.

Aurait-on pu comprendre la seconde moitié du XXe siècle sans recourir à la grille de lecture de la guerre froide? Il en va de même de l'épée de Damoclès climatique pour le XXIe: le péril écologique se substitue - ou plutôt s'ajoute - au danger des armes de destruction massive.

" Nous sommes tous embarqués sur le Titanic, même si certains voyagent en première classe ", a écrit Susan George. De fait, de larges secteurs du Nord et l'écrasante majorité des habitants du Sud se trouvent déjà, quant à eux, en deuxième ou troisième classe, voire dans les soutes. Que deviendront-ils demain, avec le réchauffement climatique, la montée des océans, les tempêtes et ouragans, la désertification, la déforestation, l'érosion des sols, la raréfaction de l'eau, les épidémies, etc. ? Et où iront les centaines de millions d'hommes et de femmes ainsi chassés de leur terre natale, sinon vers les favelas de la misère, les rangs des guérillas ou les barques tentant de gagner l'Occident ?

Ces sources des conflits intra ou interétatiques de demain sont déjà à l'œuvre aujourd'hui. Une des clés de l'affrontement israélo-palestinien n'est-elle pas l'eau? La pénurie annoncée de pétrole n'explique-t-elle pas le "grand jeu" opposant Russie et Occidentaux dans le Caucase et l'Asie centrale? Le malheur du Darfour ne vient-il pas aussi du combat pour des ressources naturelles qui se raréfient? Est-ce un hasard si, de l'Asie au Maghreb, Al-Qaida et ses filiales recrutent dans les pires bidonvilles?

Ce nouveau paradigme marque une rupture dans la pensée traditionnelle, y compris marxiste. Pour autant, les enjeux de l'environnement n'éclipsent pas ceux de la politique. La destruction progressive de la planète résulte d'abord de la logique du profit à court terme, qui prime sur les besoins des êtres humains, et plus généralement du productivisme . A long terme, la sauvegarde de la vie sur Terre implique des ruptures radicales dans sa gestion, afin que le Nord prenne en compte les intérêts du Sud, et qu'au Sud comme au Nord le sort des milliards de pauvres passe avant celui des minorités fortunées.

C'est bien pourquoi certains tentent de récupérer ces nouvelles problématiques. La palme revient à George W. Bush, qui, présidant le pays le plus pollueur du monde, s'obstine à ne pas parapher les accords de Kyoto : bien qu'au sommet du G8 de juin 2007 il ait encore refusé de souscrire quelque engagement ferme, il a pris l'initiative de nouvelles négociations destinées à réduire les émissions de gaz carbonique ... après 2012 !

A Pékin, on se targue volontiers d'expériences-pilotes. Mais ces efforts ne sauraient faire oublier qu'à la fin de 2007 la Chine deviendra le plus grand émetteur de gaz à effet de serre, dépassant alors les Etats-Unis. Et pour cause: non seulement, entre 1994 et 2004, elle a augmenté chaque année ses émissions de gaz de 4 %, mais le charbon lui fournit encore les deux tiers de son énergie.

Des classes dirigeantes prédatrices

Prestidigitateur, le nouveau président français l'est aussi : partisan de l'énergie nucléaire (réacteur EPR compris), des OGM et des autoroutes, il n'en a pas moins convoqué pour octobre 2007 un "Grenelle de l'environnement", auquel nombre d'associations s'apprêtent à participer. Comme si l'expérience du "pacte écologique" de Nicolas Hulot n'avait pas suffi: aussi vite enterré que signé, il a permis d'escamoter l'écologie dans la campagne électorale ...

En réalité, comme l'écrit Hervé Kempf dans Comment les riches détruisent la planète (Seuil, Paris, 2007), le monde "est aujourd'hui gouverné par une oligarchie qui accumule revenus, patrimoine et pouvoir avec avidité… Cette classe dirigeante prédatrice et cupide… ne porte aucun projet, n'est animée d'aucun idéal, ne délivre aucune parole"…

L’Atlas environnement : analyses et solutions
Le Monde diplomatique 2007


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